Altitude : 610 m
Le territoire est limité au nord par Maisod, Charchilla, Crenans, Meussia, Etival et Les Crozets ; au sud par Lect, Martigna et les Villards d'Héria ; à l'est par Saint-Lupicin, Ravilloles et les Crozets ; à l'ouest par Lect et la rivière d'Ain qui le sépare d'Onoz.
Le bourg est situé au fond d'une étroite gorge resserrée entre deux hautes montagnes. Les rues sont larges et bien percées. Les maisons bordent pour la plupart la route de Lons-le-Saunier à Genève. Elles sont construites en pierre, élevées de plusieurs étages et couvertes en zing, tuiles plates ou tavaillons.
Population en 1790 : 1179 hab.; en 1846 : 1503; en 1851 : 1458, dont 699 hommes et 759 femmes; Pop. spécif. par kil. carré, 111 ; 215 maisons, savoir : dans la rue du Jura, 33 ; dans la rue Saint-Nicolas, 75 et dans la rue Saint-Laurent, 60; à la grange du Pontet, 1; du Roselay, 1; du Chazal, 1; à la grange Michaud, 1; vers chez les Dalloz , 1; à la grange du Poisia, 1; des Peillodes, 1; du marais, 1; de l'Etang et à la Tuilerie, 1; à la grange des Anges, 1; aux granges de la Chèvrerie, 3; à la grange Romanet, 1; à la grange Rouge-Palu, 1; de la Poyat,1 ; de la Penne, 3; de Racluse, 1; de Troile, 1; sur Tangeat, 1; derrière le Mont-Robert, 3; à la Grange-Neuve, 1; de Noyat, 1; de Marleya, 1; de Biat, 1; de Perochet, 1; de Sous-Bonans, 1; de la Baraque, 1; des Forges, 1; de Champ-Bouccon, 1; de Généria, 1; de Vay, 1; de Chasier, 1; du Bois, 1; à la grange Labry, 1; au Hangar, 2; 428 ménages.
Les plus anciens registres de l'état civil datent de 1576.
Le sol, montagneux, rend trois fois la semence, et produit du blé, du seigle, de l'orge, de l'avoine, du maïs, des légumes secs, des pommes de terre, beaucoup de foin, des fourrages artificiels ; peu de betteraves, de chanvre et de fruits.
Marchés. Ils se tiennent les lundi et vendredi de chaque semaine. Ceux du vendredi sont plus importants.
Biens communaux : une église, un cimetière en dehors et au nord-ouest de la ville, au centre duquel est une vieille chapelle, un presbytère, une maison commune, construite en 1835, contenant la mairie, l'auditoire de la justice de paix, les salles d'études des garçons, fréquentées en hiver par 115 élèves; cette maison commune va être démolie et remplacée par un hôtel-de-ville et des halles, dont l'adjudication a eu lieu au mois de juin 1855, moyennant160.00fr.; une maison d'école, contenant le dépôt des pompes à incendies, le logement de trois institutrices religieuses de l'ordre de Saint-Vincent-de-Paul, dont la maison principale est à Besançon, et deux salles d'études fréquentées en hiver par 110 élèves. Cet édifice menace ruine, mais il en a été construit un autre en 1854-1855, encore inhabité et qui a couté 30.000fr.; un très beau châlet*, loué aux sociétaires et construit en 1824 ; il contient deux fromageries dans lesquelles on fabrique annuellement 30.000 kil. de fromage façon gruyère ; il y a un autre châlet, appartenant aux sociétaires, dans lequel on fait 5000 kil. de fromage ; un four très ancien ; cinq fontaines dont les bassins servent d'abreuvoirs en été ; deux lavoirs couverts en mauvais état ; cinq pompes à incendies, manoeuvrées par une compagnie de 60 pompiers ; une promenade emplantée d'arbres, appelée place Sainte-Anne ; deux places publiques ; un abattoir ; un champ de foire, ombragé par des tilleuls ; un jeu de quilles, et 1408h 59a de forêts de sapins et autres, de pâtures, fiches et broussailles, d'un rev. cad. de 6198fr.
Bois communaux : Moirans a une forêt en taillis de 666h 66a, dont la coupe annuelle est de 15h, et une forêt de sapins et hêtres de 616h 98a, dans laquelle on peut couper annuellement 500 arbres.
La ville actuelle de Moirans n'est pas fort ancienne. Ce n'est quà partir du 12éme au 13éme siècle qu'elle se forma, par le déplacement successif de la ville gauloise de Mauriana, qui existait au milieu d'une plaine qu'on appelle encore aujourd'hui Mauran. Cette plaine s'étend entre une haute montagne, à l'ouest de Moirans et de la rivière d'Ain. Mauriana, qu'il faut bien se garder de confondre, comme on l'a fait jusqu'à présent, avec la ville d'Antre ou avec Moirans, se groupait autour d'une légère éminence, sur laquelle a été bâtie l'église dédiée à Saint-Laurent. Cette église a succédé probablement à un temple païen. On croit généralement que les druides avaient fait des épaisses forêts voisines de Mauriana et d'Antre, le siège de leur suprématie religieuse dans le sid de la Séquanie. Le Champ Dolent, qui se trouve entre la première de ces villes et Martigna, rappelle par sa dénomination, le gigantesque menhir de champ Dolent près de Dol en Bretagne. La colonie de vétérans envoyée par l'Empereur Auguste, pour contenir les populations pressées sur les bords de la Bienne et de L'Ain, ont dû nécessairement faire d'Antre et de Mauriana, pour l'administration, les moeurs et le culte, des villes toutes romaines. Le druidisme se vit alors forcé de se réfugier dans les bourgades éloignées et dans des lieux plus sauvages. Les différentes voies qui reliaient Ledo, Orgelet, Salins, à la cité d'Antre, aboutissaint à Mauriana, et se continuaient ensuite par une seule ligne dans la gorge de Moirans, pour arriver à Condat et à Genève. Elles étaient protégées par un castellum, dont les ruines sont appelées Château-le-Vieux, Lavieu ou Levrin. Près du bourg de Moind, dans le Lyonnais, où l'on a trouvé les restes d'un théatre, d'un hypocauste, d'un temple, le monument désigné dans d'anciens titres, sous le nom de domus Palatii ou de vetus Palatium, s'appelle aussi le Château-Lavieu ou Château des Sarrazins. Le nom de Mauriana ou de urbs Maurianensis, ne se rencontre que dans la légende de la vie de Saint-Marin. Ce saint, né en Italie, dans la seconde moitié du 7éme siècle, ayant embrassé l'état religieux, se fit tellement remarquer par ses vertus, qu'on voulut l'élever à l'épiscopat. La crainte d'occuper cette haute dignité le détermina à fuire. IL partit de Rome au milieu de la nuit, seul et suivant la route qui conduisait dans les gaules, où il forma le dessein de vivre caché dans la solitude. Arrivé dans les monts Jura, il s'arrêta dans le monastère de Condat (Condar ou Candor), habité alors par un grand nombre de moines bénédictins, "consurgens mediânocte, coepit pergere in partes Burgundioe, in locum qui dicebatur Juga montiom, ubi erat monasterium. Locus autem ille vocabatur Condarensis, prope urbem Maurianam super rivulul Surioe" Ayant été choisi pour enseigner les saintes Ecritures, marin vit affluer autour de lui une telle multitude de disciples que sa modestie fut encore alarmée. Après un séjour d'une année dans le monastère, il demanda permission à l'abbé de se retirer dans un lieu désert appelé la Grande-Montagne, "quatenùs in monte qui vocatur Magnus, solitarius degere valeret". Ce lieu est incertain. M. D. Monnier pense que cette montagne est celle de Marigna, entre Saint-Claude et Condes, et que son nom lui vient de Marinus. Deux graves objections peuvent être faites à cette conjecture ; puisqu'il y a dans le Jura plusieurs village du nom de Marigna, il faut chercher l'étymologie de ce mot ailleurs que dans le nom de Marinus ou Saint Marin. D'un autre côté, le légendaire ne dit point que Saint Marin se retira, mais seulement qu'il demanda à se retirer sur la grande montagne ; il affirme, au contraire, qu'il bâtit son ermitage à Mauriana. " Surrexit autem sanctissimus vir Marinus in villam Morianensem super rivulum Surioe, et coepit ili solus habitare." Nous croyons que la grande montagne mentionnée dans la légende, est celle de Grammont, Mons Magnus, sur la rive droite de l'Ain, proche de la Tour-du-May, et que le ruisseau de Suria, rivulum Surioe, n'est autre chose que celui appelé le bief de Tésin, du Murgin ou des Murgers, qui traverse l'emplacement de Mauriana. Le nom de bief des Murgers a dû lui être donné, à cause des ruines accumulées sur ses bords. Il y avait plusieurs années que Marin vivait dans un ermitage construit par lui sur la montagne qui dominait Mauriana, ne conversant qu'avec Dieu et les anges, lorsque les Sarrazins firent une nouvelle invasion dans les Gaules (732). Repoussés par Charles-le-Martel, ils se dispersèrent. Une de leurs bandes, conduite par un chef appelé Engalde, se répandit dans les montagnes du Jura, pilla l'abbaye de Saint-Oyan, et se présenta pour brûler Mauriana : " Conati sunt venire ad urbem Maurianam ut illam igne cremarent." C'est alors que Saint Marin sortit de sa retraite, pour essayer d'arrêter la fureur de ces conquérants féroces. Il s'avanca courageusement à leur rencontre et leur parla au nom de Dieu trois fois saint, dont ils renversaient les autels et dispersaient les serviteurs. Il fut aussitôt arrêté et conduit à l'un de leurs chefs nommé Acquirinus, qui lui parla d'abord avec dureté et lui ordonna de renier le Christ, en lui promettant de grandes récompenses s'il apostasiait. Sur son refus, on le fit jeter dans une fournaise embrasée. Dieu apaisa miraculeusement l'ardeur des flammes, et Marin n'en ressentit point les atteintes. A cette vue, le chef sarrasin entra en fureur, et ayant fait saisir le généreux martyr de Jésus-Christ, il lui fit trancher la tête. Saint Marin fut enseveli au lieu même de son supplice, d'où son corps fut bientôt transporté au monastère de Saint-Savin en Poitou, comme l'atteste l'histoire de l'invention de ses reliques.
Seigneurie. En succédant à la cité de Mauriana, Moirans devint le centre d'une baronnie ou bâtis, dont la circonscription embrassait les villages de Lect, Vouglans, Brilla, Grand-Villard d'Héria, Maisod, Martigna, Meucia, Charchilla, Crenans, Coulouvre, Garde-Chemin, ETival et Ronchaud. Les droits seigneuriaux se réduisaient à l'exercice de la justice, à la perception de certaines dîmes, droits de lods sur les mutations d'immeubles, à raison du 12e du prix, à la banalité des fours, à un droit d'éminage et de pochonage sur les denrées amenées ou achetées par des étrangers les jours de foires et de marchés, et dans la propriété d'un moulin, de forêts et de plusieurs prés.
Seigneurs. Les abbés de Saint-Claude étaient les possesseurs de la baronnie de Moirans. Par un acte dumois de septembre 1296, l'abbé Etienne de Villars, après avoir exposé que l'un de ses prédécesseurs et ses religieux, dévorés par des emprunts usuraires, avaient été obligés d'engager pour 2000 livres viennoises le château de Moirans et ses revenus, à André Chatard, châtelain d'Arbent, et combien il lui importerait de rentrer en possession de ce domaine, pria Humbert de Dortans, damoieau, son fidèle, de lui prêter 1000 livres pour en faciliter le rachat. Ce seigneur accéda à cette demande, en exigeant toutefois pour garantie, les revenus de plusieurs villages et le cautionnement de huit des plus riches vassaux de l'abbé. André Chatard fut remboursé, et dès ce moment la baronnie ne cessa d'appartenir aux abbés de Saint-Claude. Au mois d'avril 1302, le même Etienne de Villars et HUgues, prieur de Vaucluse, mirent fin, par un traité dont Bernard de Moirans fut le principal médiateur, à des difficultés sans cesse renaissantes entre leurs sujets, qui amenaient les combats les plus sanglants. L'abbé céda à la chartreuse ses droits sur le village de Nermier, et reçu en contre-échange tout ce que la chartreuse possédait sur la rive gauche de l'ain, en terres, prés, pâturages, maisons, dîmes, bois, cours d'eau et juridiction. Il fut convenu que nul ne pourrait construire de maisons depuis le sommet de la montagne de Bonnans jusqu'à la rivière d'Ain, et que le pré de Bonnans ne pourrait jamais être mis en culture. Le 13 août 1313, une autre transaction importante eut lieu entre l'abbé Odon de Vaudrey et les seigneurs de Maisod, du Rognon, de Boutavant et de Chassal, qui possédaient les biens de la baronnie de Moirans. Il fut convenu qu'à l'abbé appartiendraient exclusivement, la haute justice et l'application des peines corporelles dans l'étendue de la baronnie ; que les seigneurs et leurs sujets pourraient prendre du bois pour bâtir et se chauffer, dans les forêts, jusqu'aux limites d'Etival, Ronchaud et Ravilloles ; que le Seigneur de Maisod pourrait couper du bois mort et vif, et ses sujets, du bois mort, depuis le bief Blanc au bief du Murgin.
Châteaux. A l'est de Moirans, s'élèvent deux monticules, séparés par une vallée. Sur l'on on voit les restes de quelques constructions appelées le Vieux-Château. Là était le château primitif. Derrière le choeur de l'église, est le second monticule que couronnait un château-fort construit au 14éme siècle, appelé le Château-Neuf. Une ceinture de fossés en défendait l'approche. Les abbés de Saint-Claude y firent souvent leur résidence, entourés d'une cour nombreuse. Les sujets étaient tenus d'y faire le guet et le revue d'armes, sous les ordres d'un capitaine-châtelain. Cette forteresse, plusieurs fois attaquée par les protestants suisses, fut ruinée par l'armée française en 1637, et n'a jamais été relevée. Les abbés firent construire à la fin du 17éme, au pied de la montagne, une maison avec tour pour recevoir les dîmes et autres redevances seigneuriales. Cette maison, appelée le Château, est située dans la rue du Jura et appartient à François-Xavier Dalloz, aubergiste.
Franchise. Le territoire de Moirans, dans les limites comprises entre quatre bornes ou croix, était franc, et un lieu d'asile pour les criminels. Nul ne pouvait y être arrêté. Cette franchise, qui ne reposait sur aucun titre de concession, ne pouvait résulter que de privilège dont avait joui Mauriana sous l'administration romaine.
Foires franches. Le 20 octobre 1537, l'abbé Pierre de la Baume maintint les habitants dans le droit d'avoir quatre foires annuellement. Le seigneur percevait un droit d'éminage et de pochonage, fixé à un pochon sur 2 bichons, le bichon composé de 16 pochons, sur toutes les denrées amenées aux foires et marchés, mais les bourgeois et habitants de Moirans en étaient exempts.
Droit de chasse et de pêche. Les bourgeois avaient la faculté de chasser et de pêcher dans toute l'étendue de la terre de Saint-Claude. Ce droit fut reconnu par l'intendant de l'abbé dom Juan d'Autriche, le 16 novembre 1667.
Droit d'incolat. Aucun étranger ne pouvait venir fixer sa résidence à Moirans, sans le consentement des habitants. POur être admis, il devait justifier qu'il était libre ou avait été affranchi par son seigneur, et payer un droit d'entrée variant de 6 à 10 francs, selon la fortune.
Droit de bourgeoisie. On distinguait à Moirans, deux espèces de bourgeois, les résidants et les forains. Les Privilèges et les conditions d'admissibilité étaient les mêmes. La plupart des nobles de la baronnie sollicitaient des lettres de bourgeoisie, pour ne pas payer de droit d'éminage. Le postulant devait justifier qu'il avait toujours été libre, professé la religion catholique, apostolique et romaine, qu'aucune condamnation ne l'avait frappé, et qu'il était de bonnes vie et moeurs. La lettre de bourgeoisie se payait de 100 à 200 fr.
Octroi. En 1740, la municipalité fut autorisée à percevoir 6 deniers par chariot étranger chargé de blé, vin et autres marchandises traversant la ville, à charge d'en employer la recette à paver les rues.
Droit de boulangerie. Il consistait à la perception de 2 sols par mesure employée par les boulangers. Cet impôt produisait un revenu de 150fr.
Droit de marage des vins. Il était perçu sur tous les vins qui se vendaient en détail dans la ville, à raison de 20 sols par baral.
Droit de boucherie. Tous les bouchers qui vendaient leurs marchandises à la boucherie, étaient tenus de payer un impôt variable sur chaque nature de viande qu'ils débitaient. Ces impôts réunis, produisaient annuellement 1400fr. Ils constituaient toutes les ressources de la ville, tandis que les charges ordinaires s'élevaient à plus de 1800fr.
Biens communaux : Moirans possédait des bois communaux et des pâturages très étendus. Les abbés de Saint-Claude prétendaient que la ville n'avait sur ces biens que des droits d'usage, et que la propriété leur était réservée, en qualité de seigneurs. Les habitants justifièrent, que depuis le 15éme siècle, ils avaient aliéné tous les terrains sur lesquels s'étaient formés de nombreuses granges qui entouraient la ville, cédé des droits d'usage à différents particuliers, vendu des coupes de bois de sapins, mis en culture des parcours. Ils parvinrent sans peine à faire reconnaitre qu'ils étaient les vrais propriétaires de leurs communaux.
Droits honorifiques et de justice. Moirans avait sa maison commune, son sceau, ses armoiries, son beffroi. Au conseil appartenaient les droits de collation de plusieurs chapelles, la présentation des familiers, du sacristain, l'administration de l'hôpital et du collège. Le premier échevin faisait les règlements de police, les faisait exécuter et prononçait les amendes.
Armoiries. Les armoiries de Moirans, telles qu'elles sont représentées sur une pierre de l'église, consistaient en une tête de Maure surmontée d'une croix de Saint-André avec une étoile, et la légende ARMA MOYRINCI. Quelques auteurs ont cru voir dans ces armes un souvenir du séjour à Mauriana d'une population de race noire, originaire de Mauritanie. Cette opinion ne peut soutenir le moindre examen. Les villes n'ont commencé à avoir des armoiries qu'à la fin du 13éme ou au commencement du 14éme siècle. La plupart adoptèrent, ou les armes de leurs seigneurs, ou des armes parlantes, c'est à dire, offrant de l'analogie avec leurs noms. Ainsi, Orgelet portait dans son écu, trois épis d'orge, Feurs, une faulx, etc. Moirans choisit une tête de Maure, à cause de la ressemblance du nom avec Mauran ou Moyrans.
Commerce et industrie au moyen-âge. Moirans était une ville où le commerce et l'industrie florissaient, surtout aux 15éme et 16éme siècle. On y comptait plusieurs fabriques de drap et de laine. Différentes granges étaient appelées chèvreries, parce qu'on y élevait des chèvres et des moutons destinés à fournir les matières premières. Les tisserands étaient organisés en corporation, sous le vocable de Saint-Séverin ; ils avaient leurs statuts, leur chapelle, leur chef qualifié de roi, et différents privilèges qui leur étaient assurés, en plaçant sur la porte de leurs maisons, des espèces de pannonceaux ou écussons représentant des cardes ou des ciseaux à tondre. Les cordonniers et les tanneurs étaient aussi organisés en confrérie, sous le vocable de Saint-Crépin et de Saint-Crépinien ; les marchands sous celui de Sainte-Barbe ; les bouchers sous celui de Saint-Antoine. Le bief du murger mettait en activité des forges, des moulins et des battoirs. Des ouvriers travaillaient le buis comme à Saint-Claude. Les foires et les marchés attiraient un grand nombre d'étrangers, des environs d'Orgelet, d'Arinthod, du Bugey et de Saint-Claude. Les invasions des Calvinistes et les guerres du 17éme siècle ont mis seules fin à cette prospérité.
Fortifications. Moirans a eu ses portes et ses fortifications, mais elles ont disparu et n'ont laissé aucune trace.
Guerres et siéges. Lorsque les troupes comtoises allèrent prendre possession, au nom du Duc de BOurgogne, de la terre de Montréal, confisquée sur le sire de Thoire-Villars en 1402 ou 1403, elles étaient suivies par un troupeau de vaches destinées à leur nourriture. En traversant Moirans, une de ces vaches reçut un coup et tomba. Les hommes qui conduisaient le troupeau coururent en toute hâte annoncer cet évènement au grand Jean Guillaume qui commandait à Montréal, au nom du Duc. Ce capitaine, dans sa fureur, se précipita avec une bande de ses soldats sur Viry, Rogna et autres villages voisins, pilla les églises, les maisons particulières, maltraita les habitants, et ne voulut jamais consentir à les recevoir à composition. Il vint ensuite à Moirans, exigea une rençon de 700 écus, et ne se retira qu'après avoir commis dans cette ville toutes sortes d'excès. L'abbé et les religieux de Saint-Claude portèrent leurs plaintes à Jean, Duc de Bourgogne. Ce prince, par une lettre datée à Gand, du 1er août 1407, chargea Jean de Martignry, son procureur au bailliage d'Aval, de faire une enquête, mais nous ne connaissons pas le résultat. Les troupes de Louis XI attaquèrent Moirans en 1479 et y causèrent de grands dommages. Les protestants firent plusieurs courses dans la terre de Moirans, au 16éme siècle, détruisirent les récoltes, enlevèrent le bétail dans les champs et attaquèrent les fermes isolées. Il parait toutefois que la ville, en se tenant sur ses gardes, sut se faire respecter. En 1595, les troupes d'Henri IV mirent Moirans à contribution et pillèrent plusieurs maisons. Au mois d'avril 1637, le Duc de Longeville marcha contre Saint-Claude et se disposa à attaquer Orgelet. Le Marquis de Saint-Martin, prévenu de ses projets, se hâta de mettre bonne garde dans cette dernière ville, passa à Clairvaux et fit occuper les passages de Moirans par un régiment de dragons lorrains. Il mit proche de la ville, partie de sa cavalerie et de son infanterie, en forme d'avant-garde, et le maréchal de Bourgogne logea à Clairvaux avec le surplus. "Cependant, dit Girardot de Beauchemin, Longeville découvrit un chemin dans la montagne de Cernon tirant à Moirans, qui n'estoit pas gardé, car il estoit extraodinaire, et surprit par là le régiment de dragons en pleine minuict, lequel quitta son poste et fut suivy par les François. Moirans fut emporté et bruslé, et ceux qui estoient postés de proche en proche furent poussés vivement, car les François estoient forts ; et la première garde des dragons ayant quitté sans combattre, tous les quartiers qui se reposoient sur elle furent surpris, mais tous se retirèrent sans perte au gros de l'armée, que le mareschal au premier bruit et à la veue des villages bruslants, mit promptement en bataille et la tint en cest estat jusques au jour, que les coureurs par lui envoyez luy apportant la certitude de la retraite de l'ennemy, il se desmarcha néant-moins (comme déscouvert) deux lieues en arrière en lieu fort, proche de l'abbaye e Balerne, et en donna advis au marquis qui estoit encore avec le Duc." La capitulation accordée au trois bâtis de la terre de Saint-Claude par le Duc de Duras, le 2 juillet 1674, a évité les calamités de la guerre à la ville de Moirans.
Pestes. La peste a sévi très souvent à Moirans, notamment en 1349, de 1489 à 1496, en 1630, et de 1638 à 1641. Les malades étaient relèguès dans la grotte des Jargillards, qui a conservé le nom de caverne de la peste. Une croix, érigée sur le cimetière des pestiférés, fut enlevée en 1790, et placée plus tard sur la tombe de M. Millet, selon le voeu de cet ecclésiastique, qui fut pendant plus de 40 ans curé de la paroisse.
Inondations. En 1844, une trombe d'eau étant tombée sur les montagnes du voisinage, Moirans fut tout à coup inondé sans avoir eu de pluie. Les eaux s'élevèrent à plus d'un mètre dans les rues et causèrent de grands dégâts.Une autre inondation eut lieu en 1852, par suite de la rupture de la chaussée de l'étang de la Sauge.
Incendies. Indépendamment des incendies causés par les guerres, Moirans en subit beaucoup d'autres. L'usage de construire les maisons en bois, de les couvrir en lames minces de sapins, rendaient les sinistres aussi terribles que fréquents. Le dernier incendie, arrivé le 31 mai 1847, a détruit sept maisons.
Evènements divers. Saint François de Salles allant à Genève, séjourna à Moirans dans la maison Chavériat en face du presbytère. Une statuette de ce saint, placée dans une niche sur le façade de cette maison, en perpétue le souvenir. Plusieurs sorciers ont été brûlés au 15éme et 16éme siècle sur la place de cette ville. La sorcellerie avait d'autant plus d'influence dans cette localité, que les habitants passaient pour très crédules. Les bourgeois d'Orgelet et de Saint-Claude, animés d'une secrète jalousie contre eux, se plaisaient à les rendre ridicules, en les mettant en scène dans les évènements les plus grotesques et les plaisanteries les plus sottes. POligny agissait du reste de même à l'égard d'Arbois.
ETABLISSEMENTS RELIGIEUX
Eglise paroissiale. l'église primitive de Moirans occupait une éminence dominant une grande plaine, aujourd'hui en nature de pré et de pâturage, entre la rivière d'AIn et la montagne qui est à l'ouest de la ville. Elle était dédiée à Saint Laurent et entourée par les habitations de Mauriana. Il n'en reste que le choeur, qui a été converti en chapelle. Dans le dallage de cet édifice, on remarque plusieurs pierres tombales, notamment celle d'un grand juge de Saint-Claude, dont le nom est effacé. Le cimetière, dans lequel se font encore les inhumations, est autour de la chapelle. Le presbytère était à côté, dans ce lieu dit au champ de la cure. Ce n'est qu'à partir du 17éme siècle que cette église a été abandonnée.
Eglise et familiarité Saint-Nicolas. Au pied de la montagne couronnée par le Château-Neuf, était une église châtelaine ou filiale de la précédente, dédiée à Saint-Nicola, dans laquelle se forma, au 14éme siècle, une société de prêtres pour la fondations des services particuliers. Cette familiarité, composée d'un nombre de membres qui varia de treize à quatre, reçut des soldats en 1514, d'Antoine de Vergy, archevêque de Besançon. Le patronage de la cure appartenait à l'abbé de Saint-Claude. L'église, aujourd'hui dédiée à Saint-Nicolas et à Saint-Laurent, est au centre du bourg. On y accède par 22 degrés d'escaliers. Elle se compose de trois nefs, d'une tribune, d'un choeur rectangulaire, d'un clocher à gauche du choeur, et d'une sacristie. Le clocher était couronné par une belle flèche octogonale, qui a été remplacée en 1825, par un dôme d'un mauvais effet. L'ensemble de l'édifice date du 16éme siécle. On y remarque les tombes de, 1° Guillaume-Alexandre Muyard de Cogna, écuyer, seigneur de Bioux, qui légua 24000 livres à l'hôpital de Saint-Claude, pour les pauvres malades de la paroisse de Moirans et mourut le 2 septembre1743 ; 2° de Guillaume-Joseph Muyard, seigneur de Cogna, conseiller-maître à la chambre des comptes de Dole, mort le 14 décembre 1748 ; de Mme Christine Bidey, son épouse, décédée le 27 août 1713, et de plusieurs écclésiastiques, familiers ou curés de Moirans. Il y avait avant la révolution plusieurs reliquaires en argent, renfermant les reliques de Saint-Laurent, Saint-Nicolas, Saint-Maurice, Saint-Vincent et Saint-Jucondin, et sept autels. Cette église fut brûlée trois fois, et en 1637, les cloches furent fondues par la violence du feu.
Presbytère. Par son testament du 24 juin 1760, Henri-François Muyard, curé de Moirans et archiprêtre, donna à la ville sa maison de résidence pour servir de presbytère, à charge de faire célébrer annuellement trois messes hautes pour le repos de son âme.
Confréries. On comptait neuf confréries qui faisaient leurs exercices dans l'église Saint-Nicolas. C'étaient celles des filles de la Conférence, du Saint-Sacrement, du Rosaire, du Mont-Carmel, de la Visitation, de Saint-Antoine, de Sainte-Barbe, de Saint-Crépin, de Saint-Séverin et des Trépassés.
Chapelle Sainte-Anne. Elle avait été fondée par Antoine Chavéria, sur la place appelée aujourd'hui place Sainte-Anne. Les familiers étaient tenus d'y célébrer une messe par semaine.
Chapelle de notre Dame de Pitié. Elle existait à la place qu'occupe actuellement le châlet* communal. On y célébrait neuf messes basses chaque année.
Chapelle de Sainte-Magdeleine. Elle était à l'extrémité de la rue Saint-Nicolas. PLusieurs services y étaient fondés. On ne connait la date d'érection d'aucune de ces chapelles, qui furent toutes vendues nationalement en 1791.
Hôpital Saint-Maurice. Il se composait d'un bâtiment destiné au logement d'un hospitalier et d'une chapelle à côté, dédiée à Saint-Maurice et à Notre-Dame. Cet hospice était situé sur l'emplacement actuel du jeu de quilles, devant la place Saint-Maurice. Déjà en 1628, l'hospitalité n'y était plus exercée. On se bornait à célébrer quelques services fondés dans la chapelle, notamment par M. de Blanzac.
Aumône générale. De temps immémorial, il existait à Moirans un bureau de charité, appelé l'Aumône générale, administré par un bureau composé de huit membres. Son but était de distribuer du pain toute les semaines aux bourgeois pauvres.
Charité des Dames. Le bureau se composait du curé, du bailli, de quatres dames, et fournissait aux pauvres malades de la paroisse tous les secours dont ils avaient besoin. En 1783, ces deux établissements, malgré la médiocrité de leurs ressources, ont fourni aux pauvres suffisamment de blé pour ensemencer leurs champs, et tous les secours qui leur étaient nécessaires pendant l'épidémie dont la ville était affligée. Il y avait deux médecins et un chirurgien qui soignaient gratuitement les indigents.
Prévôté. La Prévôté de Moirans était exercée dans l'origine par une famille noble, qui prit le nom de cette ville. Cette maison subsista jusqu'au 16éme siècle, mais depuis longtemps l'office de prévôt n'était plus entre ses mains. Le Prévôt avait droit d'entrée aux Etats de la province. Il réunissait ordinairement à ses fonctions celles de concierge des prisons du bailliage et de visiteur des hauts chemins.
Bailliage. Dans l'origine, l'administration de la justice dans la baronnie de Moirans était confiée à deux religieux de Saint-Claude ; l'un, sous le titre de châtelain, jugeait les causes en première instance et recevait l'appel des sentences des prévôts ; l'autre, sous celui de grand-juge, recevait les appellations des sentences des châtelains, et jugeait directement les affaires du ressort de la haute justice. A partir de 1436, les religieux furent remplacés par des juges laïcs. Deux nouveaux degré de juridiction furent alors créés. On peut appeler des sentences du bailli davant le grand-juge de la judicature de Saint-Claude, et de celle du grand-juge davant le parlement. Ce nouvel état de chose pouvait offrir quelques garanties, mais il rendait les procès interminables. Pour atténuer cet inconvénient, François Foissotte, conseiller et maître des requêtes au parlement de Dole, surintendant-général de l'abbaye de Saint-Claude, pour dom Juan d'Autriche, par décision du 7 octobre 1657, supprima le bailli de Moirans en ne laissa qu'un châtelain, dont les entences se portaient directement par appel à la grande judicature de Saint-Claude. Ce changement ne satisfit personne, et dès le commencement du 18éme siècle, un bailli fut rétabli. En 1790, le personnel du bailliage se composait d'un bailli, d'un lieutenant, d'un procureur d'office, d'un greffier, de deux avocats et quatre procureurs. Ce bailliage était complètement assimilé aux bailliages royaux, quoique les oficiers fussent tous nommés par l'abbé de Saint-Claude, comme baron de Moirans. Les exécutions à mort étaient de trois natures ; il y avait un signe patibulaire à quatre piliers pour les condamnés à être pendus. Ceux qui devaient être roués ou brûlés, étaient exécutés sur la place Saint-Maurice.
Gruerie des eaux et forêts. Les eaux et forêts du bailliage étaient régies par un gruyer, chargé de poursuivre et condamné les délinquants sur le rapport des gardes. Louis XIV, après avoir étendu la juridiction de la maitrise de Poligny sur la terre de Saint-Claude, abandonna aux abbés le droit de nommer eux-mêmes leurs gruyers. Le bailli de Moirans était ordinairement le grand gruyer du bailliage. Il avait un greffier spécial pour cette juridiction.
Chancellerie. le tabellion général de la baronnie avait sous ses ordres sept notaires. IL était charger de sceller tous les contrats de scel de la cour de Moirans. L'office de tabellion général fut supprimé par l'intendant de dom Juan d'Autriche, le 16 novembre 1667. Le greffier resta chargé du scel.
Ponts et chaussées. Un agent, nommé le visiteur ou le commandant des hauts chemins, était chargé de visiter chaque année tous les chemins et ponts, de les faire entretenir et réparer, et de poursuivre ceux qui y commettaient des dégradations.
Maréchaussée. Une brigade de maréchaussée fut étanlie en 1720 à Moirans, et logée aux frais de la ville. Elle était chargée de la poursuite des voleurs, vagabonds, assassins et faux monnayeurs.
Atelier monétaire. D'après l'ancienne chronique de l'abbaye de Saint-Oyan, l'abbé Saint-Hypolite obtint de l'empereur Charlemagne la confirmation de tous les anciens privilèges de son monastère, notamment la permission de battre monnaie, que Pépin lui avait déjà accordée. "Carolus rex indulsit ipsi coenobio auctoritatem cudendi monetam, et omnia privilegia per imperatores et Francorum reges ipsi coenobio concessa confirmavit et expressè renovavit". S'il est vrai que l'empereur Frédéric Barberousse n'a pas fait de concessions nouvelles, comme le pensent certains auteurs, et qu'il s'est borné à confirmer les dons fait par ses prédécesseurs, tout en employant des formules propres à laisser croire que les libéralités émanaient directement de lui, telles que celles de concedimus supperaddidimus, les abbés de Saint-Claude auraient effectivement tenu leur droit de battre monnaie de Pépin, de CHarlemagne ou de Charles-le-Chauve.
Fermes. Il y avait à Moirans, depuis 1693, un contrôleurs des actes et un contrôleur pour la distribution du d'extraordinaire.
Capitaine de château. Le commandement du château était confié à un capitaine châtelain, institué par l'abbé de Saint-Claude. Il avait sous ses ordres des troupes à la solde de l'abbé, et les habitants payaient un droit de guet et de garde, fixé à une mesure de froment, une mesure d'avoine et 3 deniers par ménage. Cette redevance excitant des murmures, l'abbé Ferdinand de Rye, par un traité du 16 juin 1596, consentit à la réduire à dix sols tournois par ménage, à condition qu'il serait déchargé de l'obligation de fournir des hommes pour le guet et de faire sonner la trompette en cas d'imminent péril.
Milice bourgeoise. Les bourgeois formaient une milice divisée en deux compagnies et choisissaient leurs chefs. Cette milice faisait l'office de garde-feu en cas d'incendie.
Ecoles primaires. Les écoles primaires ont été beaucoup moins négligées à Moirans que dans la plupart des autres villes. De temps immémorial, l'école des garçons était dirigé par un prêtre de la familiarité, et il avait un maîtresse d'école, quelque fois deux, recevant un traitement de 60 fr. de la municipalité.
Collège. Un collège avait été établi à Moirans au XVIéme siècle. Il était dirigé par trois familiers, qui recevaient chacun un traitement de 100f. Les bâtiments étaient entretenus avec soin. Cet établissement, supprimé en 1790, n'a pas été rétabli.
Hôtel-de-Ville. Depuis l'incendie de Moirans par les français, en 1637, l'aiditoire du bailliage n'existait plus. Les officiers de justice étaient obligés de tenir leurs séances dans les cabarets. Par un traité du 14 mars 1727, le maire, les échevins et les notables abandonnèrent à l'abbé de Clermont, moyennant une somme de 1000 livres, l'hôtel-de-Ville, dans lequel ils s'engagèrent d'établir des prisons, des cachots, un logement pour le geolier, des salles d'audiences et des cabinets pour les greffes. Ils réservèrent seulement que l'abbé serait tenu d'entretenir ce bâtiment, et que le conseil pourrait tenir ses séances dans la salle d'audience, les jours où le bailliage ne siègerait pas. Cette maison était proche de l'église.
Boucheries. Les halles de la boucherie appartenaient à la ville et étaient louées à son profit. Elles s'élevaient dans la rue des boucheries.
Halles. Les halles, dans lesquelles se tenaient les foires et marchés, étaient au pied du château. Ruinées en 1637, elles n'ont pas été rétablies.
Sur un ancien plan de Moirans, on voit figurer la rue du Bourg-Neuf, du Pavement, du Grandvaux, des Chavannes, de Sainte-Magdeleine, un grand nombre de ruelles, l'église, l'hôpital Saint-Maurice, les chapelles Sainte-Anne, de Notre-Dame-de-Pitié et de Sainte-Magdeleine. Jusqu'au XVIIéme siècle, cette ville tint un rang distingué parmi celles de la province. Elle était habitée par beaucoup de familles nobles. Celles de Maisod, de Charchilla, du Rognon, de Chassal, de Meucia, des Chapelains, des Muyard, des Donzel, des Romanet, y tenaient un rang distingué. La bourgeoisie était nombreuse et occupait les fonctions de baillis, Châtelains, prévôts, capitaine du château, greffiers, commandants des grands chemins, prêtres, familiers, échevins et conseillers municipaux. Les foires et les marchés attiraient une grande affluence d'étrangers. La corporation des drapiers imprimait aux opérations commerciales une activités extraordinaire. Le séjour des abbés de Saint-Claude au château, peuplait la ville de gentils-hommes, d'abbés et de religieux. Le grand chemin conduisant à Genève, multipliait la circulation des voyageurs et des marchandises. De toute cette gloire passée, il ne reste rien.
Moirans est la patrie de :
Les familles Chavériat, Monnet, Serrand et Thevenod, de Moirans, ont fourni et fournissent encore des sujets distingués dans les différentes carrières.
Il est traversé par la route départementale N° 4, de Lons le Saunier à Genève ; par les chemins vicinaux tirant aux Crozets, à Crenans, à Lect, à Martigna, à l'abbaye de Vaucluse et au cimetière ; par les biefs du Murgin et de la Forge qui y prennent leurs sources et se jettent dans l'Ain ; par deux autres biefs et trois ravins. La rivière d'Ain longe le territoire à l'ouest.
Cadastre exécuté en 1833; surf; territ. 2781h 49a, divisés en 2750 parcelles, que possèdent 320 propriétaires dont 59 forains ; surf. imp. 2747h, savoir : 1295h en bois, sapins et taillis, 641 en pâtures, 546 en terres lab., 243 en prés, 12 en broussailles et murgers, 5h 23a en sol et aisances de bâtiments et 3h 80a en jardins, d'un rev. cad. de 27535fr.; cont. dir. en princip. 6690fr.
On importe moitié des céréales et le vin. Le revenu réel des propriétés est de 3fr. pour cent.
On élève dans la commune des bêtes à cornes, quelques porcs et chèvres. 20 ruches d'abeilles. L'agriculture y fait quelques progrès.
On trouve sur le territoire, de la marne, des carrières de pierres à bâtir et de taille, de la pierre à chaux ordinaire et hydraulique de bonne qualité.
Foires. Il y en a six annuellement qui se tiennent les 30 mars, 10 mai, 22 juin, 11 août, 18 septembre et 23 novembre. On y vend du bétail, des céréales et toutes autres marchandises qu'on rencontre ordinairement dans les foires. Pierre de la Baume, abbé de SAINT-Claude, par un acte du 20 octobre 1537, maintint les habiatnts de Moirans dans le droit de tenir quatre foires chaque année. Deux nouvelles foires furent autorisées par arrêts du conseil du Roi, des 22 septembre 1778 et 12 septembre 1780.
Commerce. On compte à Moirans 11 aubergistes, 4 épiciers, 1 boucher, 4 marchands d'étoffes, 2 modistes, 1 marchand de tabletterie, 2 marchands de grains, 1 marchand de coton filé en demi-gros.
Industrie. 2 ferblantiers, 3 maçons, 1 voiturier, 5 taillandiers, 1 tourneur, 1 perruquier, 1 fabricant de tabatières, 1 fournier, 2 cordonniers, 1 charpentier, 2 charrons, 4 menuisiers, 1 horloger, 1 maréchal-ferrant, 1 cloutier et un tailleur d'habits.
Il y a un moulin à trois tournants, une scierie avec un battoir à blé, une tuilerie et une filature de coton. Quelques familles s'occupent de tabletterie, de tournerie sur bois et sur os, et de pelotonner le coton. Beaucoup de jeunes émigrent, pour travailler comme terrassiers, maçons, tailleurs de pierres, et pour faire des fours à chaux en Suisse.
Moirans est le siège d'une justice de paix, d'une brigade de gendarmerie à pied, d'un comice agricole, et la résidence d'un receveur de l'enregistrement, d'un receveur et d'un commis-adjoint des contributions indirectes, d'un garde-général des forêts, d'un agent-voyer contonal, de deux notaires, d'un huissier et de trois médecins.
Budget : recettes ord., 8529fr.; dép. ord., 8529fr.
Bureau de Bienfaisance : rev. ord., 1562fr répartis entre 63 indigents.
Mauriana se releva en partie de ses ruines. L'empereur Lothaire en confirma la possession à l'abbaye de Saint-Oyan, sous le nom de Morincum, par son diplôme de 852 ou 853. NOus ferons remarquer à cette occasion, que Dunod et Christin, en reproduisant cette charte, dont la lecture n'est pourtant pas difficile, ont dénaturé presque tous les noms des lieux. Ainsi, ils ont écrit Laris pour Idris, Sessiacum pour Sesfiacum, Danitiacum pour Danciacum, Pugromedis pour Nigromedis, Pantum pour Nantum, Musiacum pour Musciacum, Sigonciacum pour Sygproscum, etc. Une colonie de religieux fut envoyée de l'abbaye de Saint-Oyan pour desservir la paroisse et percevoir les revenus. Le prieuré qu'elle fonda est mentionné dans une bulle du pape Pascal II, de l'an 1110, et dans le diplôme de l'empereur Frédéric Barberousse, de l'an 1184, "ecclesiam de Morinco cum prioratu et villis adjacentibus." Dans le cours du 12éme siècle, l'abbé de Saint-Claude fit construire sur un monticule un château-fort, destiné à protèger la route qui traversait la gorge de Moirans, en même temps que d'autres seigneurs élevaient le château de Garde-Chemin, proche du défilé du Pont de la Pyle et le château de Charbonel, castrum Carbonis, à l'entrée de la gorge de Giron. Des habitations se groupèrent successivement au pied de cette forteresse et devinrent le noyau du bourg actuel. La population de Mauriana déserta peu à peu le lieu en plaine qu'elle occupait, pour trouver un refuge plus assuré dans le bourg. Les religieux du prieuré rentrèrent à l'abbaye de Saint-Oyan, et il ne resta plus de cette ancienne ville que l'église et le presbytère. Ces déplacements furent partout très fréquents du 13éme au 15éme siècle.
Par une charte de 1175, Frédéric, après avoir déclaré qu'il prenait sous sa protection l'Abbé Odon II et le monastère de Saint-Oyan, et confirmé les dons faits par Charlemagne et autres empereurs ou rois, ses prédécesseurs, ajouta : "Et nos ex nostra largitate et divinâ retributionis intra multum supperaddentes, jam dicto abbati et ecclesie sancti Eugendi concedimus.Et predictus abbas et ejus successores potestatem habeant cudendi monetam prout sibi et ecclesie sancti Eugendi magis expediri cognoverunt. Statuentes igitur imperiali interdicimus edicto ut nulla personna magna aut parva, securalis ut ecclesiastica, per dominum abbatem et ecclesiam in üs que acquiserint et antecessores nostri reges sive imperatores eis contulerint et in monetà quam nos superaddidimus, molestarv ut inquietare presumat". Dans une autre charte du 18 novembre 1184, le même emprereur réitéra la concession précédente : "Indulgemus etiam ex nostrà benignitatis nostroe clementiâ, proenominato abbati sancti Eugendi et successoribus suis potestatem cudendi monetam ad formam et prtium prout ecclesioe suoe magis cognoverint expedire." Les empereurs Henri VI, en 1196, Henri VII, au mois de mai 1311, Charles IV, le 26 mai 1360, et Sigismond, le 20 mai 1415, confirmèrent le même privilège. Ce n'est que par lettres-patentes, datées à Lille, le 9 mars 1436, que le duc Philippe-le-Bo,, limitant les droits régaliens des abbés de Saint-Claude, se réserva le droit exclusif de battre monnaie. On ignore si quelques-uns des abbés ont eu un atelier monétaire dans la ville de Saint-Claude. Guillaume de Beauregard paraît être le seul qui ait usé de son droit, et encore crut-il devoir placer sa fabrication à Moirans, dans le diocèse de Besançon. La pénurie du numéraire se faisant vivemet sentir dans sa terre, ce prélat, par un traité fait le 26 juin 1373, conféra à Jacquet, dit Liatond ou Liatet, de Valence, le privilège pendant un an, de fabriquer à Moirans des francs d'or et des oboles d'argent, qui devaient être de bon poids et de bon aloi. Liatet se mit aussitôt à l'oeuvre. Il avait sous ses ordres Antoine Vonon d'Ambérieux, comme gardien, Simon Angelier de Chambéry, comme signator, Guido Fabry d'Ambronnay et Simon Tripet de Montfalcon, comme ouvriers. Aussitôt que l'archevêque et le chapitre de Besançon furent instruits de ce fait, ils invitèrent l'abbé de Saint-Claude à fermer cet atelier. Sur son refus, ils lancèrent l'interdit sur ce prélat ainsi que sur Jacques Liatet et les autres monnayeurs et même sur la ville de Moirans. Cette mesure ne produisit aucun effet. Alors l'official de l'archevêché, par une circulaire datée des calendes de décembre 1373, donna avis à tous les doyens, sous-doyens, curés et vicaires du diocèse, de l'excommunication, et les invita en même temps à la publier dans toutes les églises, à chaque messe, avant et après l'évangile et les vêpres, après avoir sonné les cloches, éteint les cierges et maudit les excommuniés. Suivant cette sentence, l'archevêque prétendait qu'on frappait à Moirans des espèces d'or, d'argent et de billon, portant les noms des différents princes et les marques les plus variées, de manière à leur donner cour dans la province. Guillaume de Beauregard, apprèciant toute la gravité de la situation, alla trouver le Pape Grégoire XI, à Avignon, et lui soumit, le 27 octobre 1374, une copie de la circulaire de l'official. A la suite d'une longue instruction, le souverain Pontife décida, le 20 décembre 1375, sous forme d'arbitrage, que l'abbé de Saint-Claude était dans son droit; mais il paraît qu'il l'invita néanmoins, par des instructions secrètes, à ne plus en user à l'avenir, afin d'éviter de déplorables discussions. Pendant le séjour de l'abbé à Avignon, le maître de la monnaie Liatet, se permit de fabriquer des pièces au coin du roi de France. Le bailli de Mâcon et d'autres justiciers de France, envoyèrent aussitôt des agents pour ravager la terre de Saint-Claude, faire des gageries et enlever tout ce qu'ils pourraient saisir. L'abbé de Saint-Claude supplia Charles V, roi de France, de l'excuser, en raison de sa bonne foi, puisque le délit s'était commis en son absence et à son insu et obtint de ce souverain des lettres de rémission, datées de Saint-Germain-en-Laye, du mois de février 1376. Dès ce moment, le monnayage cessa entièrement et ne fut pas repris.
1° Bonguyod Marc-François, député du Jura à la Convention nationale.
2° Dunod, jésuite, fondateur de plusieurs établissements de charité dans sa ville natale, et de deux ouvrages ayant pour titre, l'un : Découverte de la ville d'Antre, et l'autre : Découverte entière de la ville d'Antre.
3° Chavériat Claude-andré (1759-1822), chirugien-major des armées sous la République et l'Empire.
4° Chevassus Alexandre (1763-1838), chef de division au ministère des finances, l'un des fondateurs du Constitutionnel, oncle d'Alexandre et de Joseph Verpillat, tous deux nés à Moirans ; le premier, directeur des contributions directes à Saint-Quentin, et l'autre, inspecteur des contributions indirectes, chevalier de la légion d'Honneur, en retraite à Goberty, près Cahors.
5° Egenod François, avocat en parlement, seigneur de Marvelise et Courbenans, Maire de Besançon, auteur d'une histoire manuscrite de Besançon, mort à la fin du XVIIIéme siècle.
6° Genevay, ancien professeur de théologie au séminaire de besançon, supérieur du séminaire de Lons-le-Saunier et vicaire-général du diocèse, mort à Macornay en 1839.
7° Muyard de Vouglans Pierre François (1713-1791), conseiller au grand conseil, auteur des Institutes au droit criminel, des Lois criminelles de France et des Motifs de ma Foi. Les deux premiers ouvrages, traduits dans plusieurs langues, sont très estimés des criminalistes.
8° Goiffon Joseph (1766-1834), général de brigade. Après avoir exercé la chirurgie et la médecine dans sa ville natale, M. Goiffon s'engageat dans un régiment d'infanterie, fu tnommé en 1790, capitaine de la garde nationale et député à la fédération du 14 juillet. A son retour, on le nomma capitaine d'une compagnie de volontaires du Jura. Il assista au siège de Mayence, fut ensuite envoyé dans la Vendée comme chef d'une demi-brigade et fit par ruse 8000 vendéens prisonniers. PLus tard, étant enfermé dans la ville d'Angers, qui était bloquée par 25000 vendéens, il fit lever le blocus et chassa l'ennemei. Disgracié par Robespierre, ce n'est qu'après la mort de ce terrible révolutionnaire, qu'il fut remis en liberté et rétabli dans son grade. Il fit les campagnes d'Italie, se distingua particulièrement au siège de Mantoue et fut nommé commandant à Véronne par le général Moncey.